Lettre au ministre Boulet
Monsieur le ministre,
Depuis bientôt un an, les travailleuses et les travailleurs que nous représentons à la Fédération du commerce (CSN), soient dans les entrepôts alimentaires et pharmaceutiques, les établissements hôteliers, les restaurants, les abattoirs, les épiceries, les services financiers, ainsi que les usines agroalimentaires, sont au front pour assurer le maintien de ces services, plus que jamais essentiels, à la population québécoise.
Alors que nous sommes au cœur d’une deuxième vague de cas de Coronavirus et que de plus en plus de variants de ce virus font leur apparition, la Fédération du commerce (CSN), qui représente près de 30 000 travailleuses et travailleurs, souhaite vous sensibiliser au sort que réservent certains employeurs à nos membres. De plus, nous souhaitons vous faire part de notre désir de vous rencontrer. Nous nous doutons bien que votre emploi du temps est fort chargé, mais nous considérons que les enjeux sont trop importants pour qu’ils soient laissés aux bons soins des employeurs seuls, pour le dire ainsi.
Depuis quelque temps déjà, bon nombre d’employé-es, qui ne peuvent travailler puisque leur employeur a fermé ses portes ou qu’il a diminué grandement son personnel, voient leur lien d’emploi rompu. C’est notamment le cas pour des centaines de travailleuses et de travailleurs de l’industrie hôtelière qui perdent des droits, dont leur ancienneté. Toujours dans le secteur de l’hôtellerie, plusieurs employé-es perdent ainsi l’accessibilité aux avantages sociaux. Il n’est pas rare que des travailleuses et des travailleurs ne puissent faire une quantité d’heures leur permettant de maintenir certains avantages liés à un emploi à temps plein. Ces employé-es devraient toujours avoir accès, notamment, au régime d’assurance et de retraite, et ce, même en cas de mise à pied complète ou partielle. Pourtant, certains employeurs leur retirent l’accès. Ces travailleuses et travailleurs sont les grands perdants d’un cataclysme mondial, dont nul ne saurait amoindrir les dommages, sinon notre gouvernement. Nous croyons que les liens et les statuts d’emploi doivent être maintenus exceptionnellement. Si l’on souhaite s’assurer que la main‑d’œuvre soit au rendez-vous au moment de la reprise économique du secteur, encore faudra-t-il que cette dernière soit à l’emploi.
Bien que le « Groupe d’action pour la main-d’œuvre du secteur de l’hôtellerie » ait été mis sur pied afin de peaufiner la formation des salarié-es de ce secteur, les résultats concrets du comité ne se font pas encore ressentir. Cependant, choisir de maintenir leur lien d’emploi les libèrerait de l’épée de Damoclès qui pend au-dessus de leur tête.
D’autre part, bon nombre d’employeurs choisissent de ne pas verser les salaires lorsque les travailleuses et les travailleurs sont obligés de s’isoler à la demande de la Santé publique, par prévention de contamination du virus. Dans la quasi-totalité des cas, les employé-es ne reçoivent pas l’indemnité de remplacement de revenu pourtant prévue à la loi. Nous craignons que, par peur d’être à court d’argent, certains employé-es se voient obligés de rentrer au travail, malgré les recommandations de la Santé publique. Le maintien du salaire pour les travailleuses et les travailleurs obligés de s’isoler doit être une priorité afin d’assurer la protection de toutes et de tous. Ce sont les travailleuses et les travailleurs de la base qui subissent la violence économique de cette crise et non les grandes multinationales qui les emploient. Vous avez le pouvoir d’empêcher cette violence.
À la lumière des nombreux cas d’éclosions dans certains milieux de travail, nous jugeons immoral le choix de ne pas verser une prime de risque, couramment appelé « Prime COVID-19 ». Alors que plusieurs entreprises font des affaires d’or depuis mars 2020, rien ne justifie un manque de considération aussi flagrant. Nul besoin de vous rappeler que sans eux, la population québécoise n’aurait pas été en mesure d’accéder aux nombreux biens dits essentiels. L’Alberta a choisi récemment de verser des primes à certaines travailleuses et certains travailleurs essentiels, il faut nous en inspirer.
Depuis un moment, nous remarquons un relâchement dans certains milieux de travail, en ce qui a trait au matériel de protection et autres mesures sanitaires. Les employeurs doivent s’assurer que le matériel de protection soit disponible et en quantité suffisante, et ce, en tout temps, en plus de garantir un respect strict des mesures sanitaires.
Pour conclure, nous espérons qu’à la lecture de notre lettre, vous acquiescerez à notre demande de rencontre. Nous considérons qu’il est important que les employeurs respectent les droits de nos membres et nous considérons qu’à titre de ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, vous avez un rôle à jouer auprès de ces derniers afin que soient appliqué les quatre mesures simples que nous revendiquons, soit le retour de primes COVID-19, le maintien du salaire lorsqu’en isolement, le maintien du lien d’emploi et des avantages sociaux et la poursuite des mesures de santé et de sécurité.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le ministre, nos plus sincères salutations.
Alexandre Boileau Laviolette
Président, Fédération du commerce – CSN